Le point sur le dérangement de la faune en Chartreuse
mercredi 13 septembre 2006 par TASSAN Lionel
Le massif de la Chartreuse et plus particulièrement les zones des cols du Coq et de Porte est d’un intérêt certain en hiver pour les habitants de la cuvette grenobloise. Son potentiel est énorme : une trentaine d’itinéraires skiables, tous aussi beaux les uns que les autres, à 30 minutes de la ville. A cela, il faut y ajouter les raquettes, le ski de fond, le ski de piste... Et quand on voit le bond en avant des activités montagne depuis une dizaine d’années, les répercussions sur le terrain sont réelles. D’après l’article de JAD et d’autres échos que j’ai pu avoir à propos de la Chartreuse, il semble que le problème mis en avant soit le dérangement de la faune. Quels sont les enjeux ?
Dans le massif de la Chartreuse, deux groupes d’animaux sont concernés : les ongulés chez les mammifères et les tétraonidés chez les oiseaux. Et plus particulièrement :
– Ongulés : chamois et chevreuil 

– Tétras : tétras-lyre
Le chamois se porte bien et s’est parfaitement adapté. Il n’y en a jamais autant eu. Même sur les flancs du Charmant Som il abonde. Je n’en ai jamais autant observé que ces dernières années, en toutes saisons et il s’est très bien habitué à la présence humaine. Il m’arrive régulièrement d’en observer plus d’une centaine en une seule tournée. Le chamois se déplace très bien dans la neige. Pensez à ne pas les courser à skis pour ne pas les épuiser inutilement !
Le chevreuil est plus vulnérable et a du mal dans la profonde. En général, l’hiver, il se tient près des habitations à basse altitude, en lisière de forêts. Ce n’est pas là qu’on passe en grandes courbes sur des grandes largeurs. Et pour lui aussi, les populations sont en bonne santé.
En revanche, le tétras-lyre est plus vulnérable et le passage d’un skieur à 30m ou moins provoque l’envol et une dépense d’énergie.
Mais le randonneur hivernal est-il le seul responsable du déclin de cette espèce ?
Pour avoir randonné en montagne en toutes saisons, au rythme d’une centaine de sorties par an depuis 20 ans, parfois même dans le seul but d’observer du tétras-lyre, je peux affirmer que je n’ai jamais observé dans nos Alpes, des rassemblements de plusieurs dizaines de coqs comme cela se produisait il y a 50 ans (dixit les anciens), même dans les lieux les plus reculés et confidentiels.
Pour moi, la fréquentation hivernale de la montagne en se baladant "simplement" est un paramètre qui s’ajoute aux causes plus graves qui existent depuis une trentaine d’années : l’exploitation de la forêt au détriment de la strate arbustive et l’aménagement mécanique (dans les deux cas, on assiste tout simplement à une destruction du biotope et dans le deuxième, les quelques oiseaux "rebelles" qui se sont adaptés disparaissent par collision contre les cables des télémachins par temps de brouillard !).
Une concertation s’impose mais doit concerner tout le monde : forestiers, aménageurs, offices de tourisme, chasseurs, skieurs, raquettistes, éditeurs de topos, animateurs de sites internet. Il faut une politique globale. Ca commence par une prise de conscience générale. Je serais le premier à attirer l’attention des pratiquants sur un comportement à adopter (ne pas skier dans le bois en rive droite de la combe, ne pas s’écarter de la trace décrite d’un iota...) sur une zone sensible. Nous l’avons déjà fait dans de précédentes publications et même passé sous silence deux itinéraires très sensibles dans les Ecrins grâce à un travail en collaboration avec un garde du parc.
Interdire n’est pas la solution et c’est une atteinte de plus à la liberté d’aller et venir. Sans compter qu’on ira droit vers une politique à la Vanoise (des zones d’interdictions importantes jouxtant des zones de mécanisation et d’"anti-nature" totales).