A propos du Dakar
vendredi 4 janvier 2008 par BLETHON Jean-Baptiste
C’est une petite victoire, mais pas des moindre dans la lutte contre cette supercherie qu’est le Dakar, qui vient de se produire. Le gouvernement avait mis en garde les ressortissants français et, devant la pression, les organisateurs du rallye ont décidé de suspendre l’épreuve.
Au-delà de la portée symbolique, il convient cependant de dire qu’il est dommage que cet événement sportif ne soit ajourné qu’à cause des peurs occidentales. Si ces craintes peuvent se justifier, jamais les organisateurs n’ont mis dans la balance les menaces terroristes face à la menace routière et financière de cette course. Il est pourtant évident que le Dakar ne représente que l’aspect sportivo-économique d’une colonisation moderne qui vise à faire de l’Afrique, sous couvert d’actions de développement, un terrain de jeux et d’expérimentations. Nos braves et riches pilotes iront se consoler ailleurs et les Touaregs et autre Sahraouis ne craindront pas de se faire renverser cette année.
Gageons que les associations se saisissent du fait pour donner un coup de fouet aux actions qui sont les leurs et que l’on rencontre ainsi moins de monstres à moteurs sur les chemins.
-
5 janvier 2008 blethon bernard - étalage de puissance et fric
Je partage pleinement cet avis. Depuis trop longtemps déjà, sous couvert d’exploit sportif, certains ont fait de ces espaces un terrain de jeu, sans vraiment se soucier des populations locales. Pire même, cet étalage de puissance et de fric, donne à ces dernières une image de l’Europe qui ne peut que favoriser les vues des partisans d’une action radicale. Le sport ne peut plus être une justification pour faire n’importe quoi.
-
7 janvier 2008 romain de Lambert (Lansb) - Pas d’accord
Bonjour à tous,
avant de commencer je tiens à préciser que je ne suis pas spécialement fan du Dakar en temps qu’épreuve sportive mais force est de constater que vos points de vue sont un tantinet manichéens...Je m’explique :
– L’absence du Dakar cette année sur les pistes Africaines est, qu’on le veuille ou non, une mauvaise nouvelle pour ce continent. En effet, 70% du budget de la course est investi en Afrique, les pays demandeurs d’étapes sont toujours plus nombreux, et les retombées économiques sont énormes... Certains villages parviennent à vivre 1 an "grâce" au passage de la caravane pendant une journée. Demandez donc aux populations locales ce qu’elles pensent de l’apport de ce rallye-raid, l’annulation est tout sauf une bonne nouvelle.
– En matière de tourisme, qui dit "pays traversé par une épreuve sportive" dit "pays sûr"... l’annulation du Dakar 2008 va très certainement porter préjudice au tourisme Mauritanien et Africain en particulier.
– Oui, le Dakar pollue, c’est un fait, comme toute activité mécanique ou même simplement humaine. Mais dans quelle mesure exactement ? L’agence ADEME a effectué un bilan carbone qui révèle qu’en 15 jours de course, les voitures, les motos, camions, et tout le bazar des équipes suiveuses dégagent 22000 tonnes de CO2. A titre de comparaison, la Coupe du Monde de Rugby, autre événement planétaire, culmine à 570000 tonnes soit plus de 25 fois plus ! Et pourtant, Chabal marche à l’eau claire... et personne ne se plaint de l’impact écologique d’un tel événement...
– Les bivouacs du Dakar sont entièrement nettoyés, les déchets envoyés vers des centres de recyclage certifiés, si bien que la "caravane" laisse souvent une place plus propre qu’avant son passage... qui l’eut cru ? C’est sûr, nous autres alpinistes pouvons sans complexe donner des leçons, il n’y a qu’à regarder la tronche du col Sud de l’Everest... Ne peut on pas utiliser à cette occasion, et sans en changer un mot, la phrase de Bernard : "Depuis trop longtemps déjà, sous couvert d’exploit sportif, certains ont fait de ces espaces un terrain de jeu, sans vraiment se soucier des populations locales"
Bref, on peut ne pas aimer le Dakar (je le répète, je n’en suis pas particulièrement fan), mais le rejeter en bloc au regard de raccourcis un poil trop rapides me semble hasardeux... Il y a peu de chances que le Dakar ait lieu à nouveau sur le territoire Africain, et c’est somme toute bien dommage pour tout un peuple qui bénéficiait à l’occasion de cette "grand-messe" annuelle d’une vitrine promotionnelle immense, et, quoi qu’on en dise, d’une aide humanitaire substantielle...
-
7 janvier 2008 JEB - Réponse à Romain de Lambert
Je ne conteste pas, dans mon discours, les éventuelles retombées économiques pour ces pays, mais je crois sincèrement que c’est une infime partie de la population qui en profite. A titre d’exemple, la Mauritanie est l’un des pays les plus pauvres d’Afrique et le tourisme y est peu dévelloppé. Des copains Mauritaniens et leur tribu (de Fdérik) ne perçoivent comme retombées du Dakar que les pièces mécaniques des véhicules accidentés...Alors, quand on pense à ce que gagne la télé française, le vertige devient insoutenable. Je préfère être manichéens que naïf. Ce n’est pas la forme du Rallye que j’exècre mais le fond. Après tout il y a bien pire ailleurs et on en fait pas tout un foin.
Mais je persiste dans mon analyse, cette manifestation à des relans nauséabonds de colonialisme. En afrique, tout n’est pas permis, surtout rouler à fond la caisse dans les villages... C’est ça qui me choque aujourd’hui.
Tu as raison sur biens des points mais en ce qui me concerne, c’est la dimension humaine qui a motivé mon intervention. On en parle quand tu veux.JEB -
8 janvier 2008 romain de lambert - re-réponse à JEB
Salut JEB,
ton point de vue se défend, je ne le conteste pas et je le respecte, mais il se réfère une nouvelle fois à des vérités toutes faites qu’il convient de modérer. Par exemple, quand tu dis "En Afrique, tout n’est pas permis, surtout rouler à fond la caisse dans les villages...", bien sûr, on ne peut qu’être d’accord.
Cependant, S’il y a par le passé eu des drames au Dakar, ce fut souvent pendant les "liaisons" (terme en rallye concernant une épreuve non chronométrée, sur route ouverte) et très rarement pendant les "spéciales" (à l’exception des accidents impliquant les fameux "riches pilotes" auxquels tu fais référence, mais eux connaissent les risques encourus on est d’accord). Ca n’enlève rien à la gravité de ces rares cartons mais ils n’ont pas eu lieu pendant une course, ce sont des accidents de la circulation. Et des accidents de la circulation, il y en a environ 100000 par an en Afrique subsaharienne (source OMS), ce qui, au regard du nombre de bagnoles sur les routes, est tout bonnement hallucinant. Quand on voit tout le foin qu’on fait avec nos 5000 décès annuels pour 40 millions de caisses...
Tu l’auras compris, je persiste à dire que le Dakar n’est pas forcément une mauvaise chose pour l’Afrique, et que l’annuler pour une menace d’attentats et 4 morts (aussi regrettable et détestable soit l’attentat leur ayant coûté la vie) est un peu fort. Un parcours "bis", voire un pont aérien, déjà vu sur l’épreuve, aurait pu débloquer la situation, je pense surtout à un manque d’anticipation de la part des organisateurs.
Par ailleurs, il n’y a pas si longtemps des attentats ont fait 150 morts en Espagne, c’est pas pour ça qu’on a arrêté d’y organiser des épreuves sportives...
Enfin, pour ce qui est de "l’étalage de puissance et de fric", pas besoin d’être participant au Dakar pour en faire : le simple fait de visiter ces pays en tant qu’occidental peut-être considéré comme tel à mon sens...