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Topos copiés : controverse ECI-C2C

mercredi 20 septembre 2017 par SHAHSHAHANI Volodia

Pour les non-grimpeurs ces sigles sont ceux de l’Escalade Club de l’Isère et du site CamptoCamp. Le premier lance un appel au second, les signataires demandant au site de renoncer à la publication de topos exhaustifs en ligne afin d’en laisser la primeur aux topos papier édités par les ouvreurs, équipeurs, re-équipeurs.

Le plagiat n’est pas une exclusivité de CamptoCamp et pas non plus de l’escalade. En matière de ski de randonnée nous en savons quelque chose et dans ce domaine le site skitour est le plus performant. Mais il y a une différence.

En matière d’escalade, l’achat du topo papier a jusqu’à présent été considéré comme une reconnaissance du travail des ouvreurs qui ne bénéficient que rarement de faibles aides institutionnelles. La publication exhaustive en ligne remet en cause cet équilibre.

Dans le cas de c2c, l’éditeur-auteur copié a l’impression de passer trois fois à la caisse

  Une première fois par la "mise à disposition" gratuite de son travail avec une méthode assez simple : "Oyé braves gens, vous pouvez reproduire ici tout ce que vous avez lu, ça vous appartient, ça nous appartient"
  Une seconde fois par l’impôt qu’il paie à la Région Rhone-Alpes, sponsor des "emprunts" de CamptoCamp
  Une troisième fois par l’impôt qu’il paie à l’Union Européenne, sponsor des "emprunts" de CamptoCamp

Ce sponsoring institutionnel n’a aucune justification sinon électoraliste. Il n’est pas plus acceptable de verser de l’argent public au bobo-randonneur qu’au beauf-chasseur, (maintenant favorisé par le président de Région, Laurent Wauquiez). D’autant que des associations dont l’intérêt public est plus évident (Frapna, Mountain Wilderness) ont, elles, vu leur subventions réduites.

Les subventions peuvent être remplacées ou complétées par un sponsoring privé. Ainsi, CamptoCamp est grassement subventionné - 200 000 euros sur 2015-2016 - par la Fondation Petzl qui s’adresse au même public auquel Petzl-SAS vend ses produits. Une similitude de logo qui rappelle celle qui existe entre la société CamptoCamp-SA et l’association CamptoCamp.ORG. L’échange n’est pas à sens unique comme on peut le constater sur le site de la fondation

Ceci posé, le web a suffisamment de qualités intrinsèques sans qu’il soit nécessaire d’empiéter sur des modes d’expression plus anciens. Avec un peu de travail, les administrateurs de ces sites dits "communautaires" ou "collaboratifs" devraient trouver une formule satisfaisante, en se référant à ce qui se pratique entre éditeurs professionnels. Il est très fréquent que ces derniers travaillent sur un même secteur et des activités communes.

 Exemple n°1, ski de randonnée et alpinisme en Dauphiné : on voit très bien coexister notre collection TOPONEIGE avec les guides OLIZANE ou les guides CONSTANT. C’est une concurrence saine et respectueuse comme en témoigne cette démarche d’Emmanuel Cabau.
 Exemple n° 2, escalade. Un de nos auteurs TOPONEIGE (Lionel Tassan) m’a un jour proposé d’éditer un topo sur l’escalade en Belledonne. Je lui ai demandé d’en référer d’abord aux auteurs-ouvreurs-équipeurs du massif et particulièrement à Jean-Michel Cambon de façon à ne pas nuire à ses propres ventes de topo. La formule adoptée fut donc plus sélective et originale par rapport à l’ouvrage de base de JMC. (Finalement je n’ai pas édité cet ouvrage, n’ayant pas l’intention de créer une collection consacrée à la grimpe. J’ai alors proposé à Cédric Tassan de le faire, car "Vtopo" avait déjà commencé avec un topo des Calanques.)
 Exemple n° 3, toujours de l’escalade. Les guides "Escalade Plaisir" (chez Olizane), coexistent sans difficulté avec les topos plus exhaustifs, comme ceux de Michel Piola ou Jean-Michel Cambon. L’auteur, Hervé Galley, est également ré-équipeur de certaines voies et membre de l’ECI. Ayant participé à une trentaine d’équipements (dont une poignée d’ouvertures), il a volontairement payé de sa poche 2300 euros, sans contrepartie ni remboursement ultérieur, pour les deux tiers des points d’assurage utilisés, le reste ayant été fourni par la FFME ou l’ECI.
" A cela, précise-t-il, il faut ajouter 700 euros pour le perfo, les cordes, les mêches, les brosses, etc. Le montant total (3000 euros) de ces dépenses de matériel correspond à deux années et demi des droits d’auteur cumulés sur les deux topos d’escalade Olizane. En outre, le travail d’équipement, réalisé bénévolement, représenterait davantage, s’il était rémunéré, que le coût des points d’assurage : en ouverture, avec le nettoyage et brossage nécessaires, il faut souvent une journée (ou plus) pour deux longueurs. La contribution financière des ouvreurs bénévoles (la grande majorité) est donc importante, même lorsque le matériel est entièrement fourni par une institution."

C’est cet équilibre qui risque d’être rompu. En escalade, et dans une moindre mesure d’autres disciplines de montagne, il reste suffisamment de terrains à explorer pour les sites "collaboratifs", sans nuire aux publications en cours.
A défaut, avec le temps, on pourra vérifier l’adage, " Quand c’est gratuit, c’est toi le produit"


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