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JO : l’heure du CAO

dimanche 5 octobre 2008 par SHAHSHAHANI Volodia

A la veille d’un conseil municipal consacré à la candidature grenobloise aux Jeux Olympiques d’hiver en 2018, je reproduis ci-dessous le texte de la tribune qui m’avait été proposée par Montagnes Magazine (n° 322 octobre 2007) en même qu’une autre était proposée au maire de Grenoble, Michel Destot.

Cette histoire de JO commence par une leçon de geo. Depuis Lillehammer, le principe de l’alternance des continents semble aussi prévaloir pour les jeux d’hiver. En proposant leur candidature pour 2018, les maires de Grenoble, Gap, Annecy, décrètent de facto la station caucasienne de Sotchi " asiatique ", à contre-courant de ce que l’on enseigne encore (l’Europe se sépare du continent eurasiatique par l’Oural, la Caspienne, le Bosphore et les Dardanelles). " L’Europe de l’Atlantique à l’Oural " du Général de Gaulle a vécu ; et c’est un ancien gaulliste (Pierre Mazeaud), qui préside le comité des villes françaises ! 2022 serait la date logique pour la candidature d’une ville du protectorat Europe que l’empire US aura eu le temps de remodeler. L’actuel chef de cet Empire a aussi redéfini l’éthique des Jeux à venir. Les JO antiques supposaient une trêve entre les cités grecques. Les JO modernes ont été interrompus lors des guerres de 14-18 et 39-45. Mais aux premiers jeux d’hiver du 21° siècle (Salt Lake City, 2002), Georges Bush a rejeté explicitement un cessez-le-feu en Afghanistan.

Le CIO, sorte de syndicat mixte etats-multinationales, choisit les sites en fonction du profit que les secondes peuvent en tirer. Bien sûr, tout, dorénavant, portera une étiquette " durable ". Le sport-spectacle est devenu dans les masse-media la principale métaphore au service de la croissance, ce qui implique des performances toujours à la hausse : le trucage et le dopage sont devenus la règle.

La plupart des sports d’hiver ne se pratiquent que par des riches dans quelques pays riches. Les Jeux d’Hiver n’ont pas la notoriété de ceux de l’été, mais ils restent une honorable vitrine pour des attentats. Avec les barrages en amont et la zone chimie, les ADM sont en place : détruire Grenoble est un simple exercice pour stagiaire terroriste.
A l’époque des trente glorieuses, le programme olympique a sans doute permis de doter la ville d’infrastructures jugées indispensables. Mais à quoi bon encore des JO à Grenoble ? Construire un stade en centre ville ? C’est fait. Equiper de nouvelles stations ? L’offre est excédentaire. Renforcer le réseau routier dans cette cuvette dominée par quatre massifs ? La pollution est l’une des plus fortes en France. Le prix de l’immobilier, déjà bien placé, risque encore de flamber. Enfin, l’idée des trois candidatures peut multiplier les mauvais coups : les Jeux du cinquantenaire pour Grenoble et de fortes " compensations " pour les autres comme ce fut le cas en 92 (l’autoroute de Maurienne avec l’accès 3 Vallées d’Orelle en contrepartie des JO d’Albertville). Un scénario possible cette fois : on " trouve " enfin le financement de l’A51 par Gap.

Face à ces risques, une solution : le CAO. Un comité ALTER olympique qui, si son programme de Jeux de la décroissance n’est pas adopté, se métamorphoserait en comité ANTI olympique.
A défaut de pouvoir se prévaloir " capitale des Alpes ", Grenoble a le potentiel pour proposer un modèle du rapport ville-montagne.
A l’échelle locale, une partie du chemin est déjà faite : les stations des quatre massifs qui l’entourent sont de taille acceptable. Il reste à placer des téléphériques et des crémaillères là où il n’y en a pas (entre la ville et les villages de montagne) en attendant de les retirer progressivement là où ils ont été multipliés (des villages vers les sommets). A cet égard un casus belli serait l’attribution d’une épreuve à l’Alpe d’Huez, illustration parfaite du ski du 20° siècle, avec la mécanisation quasi totale du massif des Rousses (et des projets pour finir la besogne).

A l’Echelle globale, une collectivité peut afficher une politique internationale distincte de celle de l’Etat. C’est déjà une façon de se démarquer des guerres menées en notre nom. Des collaborations avec les pays du " Sud " sur le développement des sports de neige sont possibles avec pour ambition la réduction globale d’émission de CO2. Pour être crédible, la croissance des " émergents " doit être compensée, et au-delà, par le " désarmement " des " développés ". Ce serait un autre message que celui délivré lors de la dernière prestation olympique de Grenoble : la visite du maire Hubert Dubedout à Mexico en octobre 68, allant serrer les mains de son alter ego, dégoulinantes du sang des étudiants de la Place des Trois Cultures. Un massacre en guise de cérémonie d’ouverture. Quelques jours plus tard, l’enthousiasme renaissait par le saut de Beamon et le podium du 200 m, avec les poings noirs gantés de Tommie Smith et John Carlos dressés vers le ciel.


Messages et Commentaires ...
  • 23 octobre 2008 NAT - petition contre les JO à Grenoble

    Sur le site du CAO, http://cao38.eu.org/, on peut signer une pétition en ligne.

  • 21 novembre 2008 LTA - laïcité ?

    A ce sujet, sans prendre part pour le moment au débat "pour ou contre les JO", la ville de Grenoble s’est permise de diffuser une plaquette promotionnelle dans un certain nombre de communes (en particulier sur Saint-Martin-d’Hères où je travaille) à destination des écoles et concernant les Jeux de Neige 2008. En général, les communes distribuent gratuitement ce genre de tracts promouvant des animations communales susceptibles d’intéresser les enfants et les familles ce qui, jusque là, me paraît rentrer "dans les clous". Le hic, c’est qu’en dernière page du tract de la ville de Grenoble, il y a un feuillet intitulé "ensemble pour la candidature Grenoble-Isère 2018". Les JO étant devenus un événement politique et financier, avant d’être un événement sportif, ce genre de promotion ne s’inscrit plus du tout dans le cadre de la règle de laïcité que nous devons respecter dans les écoles. Je me demande d’ailleurs si la ville de Grenoble a eu l’aval de l’Inspection Académique pour faire passer ce document mais il faut s’attendre à tout en cette èree où les aspects financiers passent avant tout le reste y compris le respect des idées et pensées de chacun. Quoi qu’il en soit, afin de respecter cette règle de laïcité, je me suis abstenu de distribuer ce tract aux élèves et à leurs familles.

  • 5 décembre 2008 RED - Dossier

    Voir ici l’étude du groupe d’opposition grenoblois Ecologie-Solidarité

  • 2 mars 2009 RED - Mountain Wilderness contre les JO en France

    Communiqué
    Mountain Wilderness France s’oppose à l’organisation des J.O. d’hiver de 2018 dans les Alpes Françaises

    4 villes des Alpes françaises, Annecy, Grenoble, Nice et Pelvoux, sont actuellement en course pour être candidates à l’organisation des Jeux Olympiques d’hiver de 2018.

    Quelle que soit la ville finalement retenue, Mountain Wilderness France considère que la tenue d’un tel évènement dans les Alpes Françaises n’est pas acceptable.

    Selon la ville choisie, les Jeux Olympiques pourront nécessiter :
     pour les compétitions, des nouvelles infrastructures impactantes pour l’environnement en montagne, qui deviendraient inutiles et obsolètes dès les épreuves terminées.
     pour accueillir les visiteurs, des programmes immobiliers de luxe dans les stations, qui s’accompagneront forcément du développement des domaines skiables au détriment des zones de montagne vierges selon le cercle vicieux "nouveaux lits, nouvelles pistes".

    Ainsi les conséquences des jeux de Grenoble 1968 et Albertville 1992 sont bien visibles dans les massifs.

    Certes les projets de villes candidates promettent aussi l’amélioration du réseau des transports en commun dans les vallées concernées. Mais celle-ci est de toute façon indispensable dans le contexte actuel : sa réalisation devrait être prioritaire et ne devrait pas être conditionnée à la tenue des jeux dans les Alpes.

    Pendant la durée des Jeux, des milliers de personnes, athlètes, accompagnateurs, ou spectateurs seront concentrés sur les sites des épreuves. L’impact écologique en termes de déplacements, de consommation de ressources, de productions de déchets etc. ne sera pas supportable pour le milieu naturel montagnard.

    De plus Mountain Wilderness considère que les Jeux Olympiques font la promotion exclusive d’activités sportives artificielles, élitistes et déconnectées de l’environnement de montagne, à l’opposé de pratiques responsables et respectueuses du milieu défendues par notre association.

    Enfin, Mountain Wilderness considère que le modèle de développement qui permettrait aux Alpes d’être une " Montagne à Vivre " au XXIème siècle n’est pas compatible avec celui des Jeux Olympiques. Nous croyons à une montagne dont la plus grande richesse est son environnement préservé, vivant toute l’année d’un ensemble d’activités économiques durables, dont l’accueil touristique n’est qu’une composante.

    C’est pourquoi Mountain Wilderness France affirme son opposition à l’organisation des J.O. d’hiver de 2018 dans une ville des Alpes Françaises, et appelle ses adhérents et sympathisants à se joindre aux différentes manifestations qui seront organisées dans les jours à venir dans et autour des villes candidates.

    Contact presse : Vincent Neirinck - vn@mountainwilderness.fr - 04 76 01 89 08


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